« Comment la géo-ingénierie infiltre les politiques climatiques », de Marine de Guglielmo Weber et Rémi Noyon, Éditions Les Liens qui Libèrent, octobre 2024. Pages : 236. Prix : 20 euros.

Dans cet ouvrage extrêmement détaillé, les auteur(e)s nous montrent que, contrairement à une idée reçue, changer ou contrôler les phénomènes atmosphériques ne date pas de notre époque. Les historiens en feraient même une « constante historique » remontant à l’Antiquité et courante dans toutes les civilisations au fil du temps (« tirer des flèches sur les tempêtes », faire des prières, des cérémonies, des processions, faire sonner les cloches contre la grêle, effectuer des tirs de canon, etc.). Bien entendu, c’est une vision globale et non locale comme autrefois qui nous intéresse aujourd’hui, qu’il s’agisse de l’utilisation d’énergie ou de réduire le réchauffement climatique qui (avec des a-coups mais rapidement dans l’ensemble contrairement à autrefois), est de plus en plus sensible depuis l’ère pré-industrielle (1850/1900). C’est d’ailleurs depuis le 19ème siècle que l’aspect scientifique de l’étude du climat à l’échelle mondiale commence à dominer les croyances simplistes.

Des méthodes plus ou moins baroques ou réalistes ont été imaginées (et testées pour certaines) afin d’agir sur le climat, et parfois mêmes à destination guerrière !

Concernant par exemple l’utilisation d’énergie solaire, Marine de Guglielmo Weber et Rémi Noyon citent, entre autres, l’hypothèse des « sphères de Dyson » (note personnelle : voir à ce sujet pour plus de précisions le livre « Extraterrestres » de Adam Frank, montrant qu’une telle réalisation selon l’échelle de Kardachev nécessite une civilisation technologique de type 3… alors que nous ne serions que de niveau 0,7 sur cette échelle ! Il reste donc un sacré chemin à parcourir avant d’y parvenir...). Comme ils l’indiquent dans l'ouvrage, l’imagination des chercheurs ne tient pas toujours compte des problèmes techniques et financiers délirants pour notre époque...

Concernant la lutte contre le réchauffement climatique, l’écologie pourrait se scinder en deux camps : les écologistes « traditionnels », et les « green 2.0 » fervents défenseurs de la géo-ingénierie. Inévitable combat entre ceux qui pensent que nous sommes d’humbles parties de la nature, et ceux qui estiment que nous pouvons/devons la dominer avec nos techniques.

Citons quelques projets peu répandus auprès du grand public, analysés ici (parmi bien d’autres) :

  • voiler le Soleil par une sorte de « volcanisme artificiel » (injection d’éléments dans l’atmosphère) afin que moins de lumière solaire viennent chauffer sols et océans,

  • ou encore bloquer l’arrivée d’une partie des rayonnements solaires depuis l’espace,

  • Blanchir les nuages et les océans (si, si…!),

  • Recouvrir les glaciers arctiques et antarctiques par des billes de verre réfléchissantes.

  • En plus traditionnel, puits de carbone, séquestration, recyclage, etc. sont, eux, mieux connus.

Mais les phénomènes climatiques sont complexes, et même les simulations informatiques les plus poussées ne sont pas capables de nous montrer tous les effets secondaires néfastes possibles, et avec certitude, les moments de rupture irréparables.

Sont traités également les problèmes de réglementations internationales, leur application, les perceptions immédiates variables selon les pays, la multiplication et la diffusion rapide des « fake news », Sur ce dernier point, les auteur(e)s écrivent : « Voilà qui peut compliquer l’équation de la géo-ingénierie : alors qu’elle fantasme une gouvernance nationale appuyée sur des connaissances transparentes, elle prend forme dans un monde agité, traversé d’inquiétudes, de ressentiments et de défiances. »

Cet ouvrage, complet, précis, traitant du pour et du contre, sera instructif même auprès de ceux d’entre nous persuadés de bien maîtriser le sujet. Un travail d’enquête remarquable.